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Agents commerciaux : indemnité compensatrice de cessation de contrat de l'article L 134-12 du Code de commerce et refus de renouveler un contrat d'agence commerciale

Le 19 septembre 2017

L'article L 134-12 du Code de commerce prévoit qu' « en cas de cessation de ses relations avec le mandant, l'agent commercial a droit à une indemnité compensatrice en réparation du préjudice subi ».

L'article L 134-13 du même Code prévoit cependant trois cas dans lesquels l'indemnité n'est pas due à l'agent commercial :

1- La cessation du contrat est provoquée par la faute grave de l'agent commercial ;

2- La cessation du contrat résulte de l'initiative de l'agent à moins que cette cessation ne soit justifiée par des circonstances imputables au mandant ou dues à l'âge, l'infirmité ou la maladie de l'agent commercial, par suite desquels la poursuite de son activité ne peut plus être raisonnablement exigée ;
3- Selon un accord avec le mandant, l'agent commercial cède à un tiers les droits et obligations qu'il détient en vertu du contrat d'agence.

Le cas qui nous intéresse ici est le deuxième, et plus particulièrement la première partie concernant la cessation du contrat à l'initiative de l'agent commercial.

En substance, si l'agent met fin au contrat le liant au mandant alors qu'il n'a pas de griefs particuliers à l'encontre de ce dernier, il perd le droit à l'indemnité compensatrice.

Ceci étant, est-ce que le refus par l'agent commercial de conclure un nouveau contrat d'agence à l'expiration du précédent peut-être considéré comme une rupture à l'initiative de l'agent ?
Dans un arrêt du 29 juin 2010, la Cour de cassation avait jugé :

« L'indemnité prévue à l'article L. 134-12 du code de commerce ne peut être exigée dans l'hypothèse où l'agent a pris l'initiative de la rupture, peu important que cette dernière intervienne en cours d'exécution d'un contrat à durée déterminée ou à la survenance du terme; qu'ayant relevé que M. X... avait par lettre recommandée du 14 mars 2006 clairement et expressément manifesté son intention de ne pas conclure un nouveau contrat d'agent commercial à l'expiration de celui dont le terme était fixé au 31 mars 2006 alors que la société Abrisud lui avait proposé de le renouveler par courriers des 27 février et 2 mars 2006, la cour d'appel en a exactement déduit que la cessation du contrat étant intervenue à l'initiative de M. X... , il ne pouvait prétendre au paiement de l'indemnité compensatrice ; que le moyen n'est pas fondé ».

(Lien ici)

Ainsi la Chambre commerciale de la Cour de cassation a estimé que le refus de conclure un nouveau contrat d'agence à l'expiration du précédent (et si le refus n'est pas motivé par des circonstances imputables au mandant) prive l'agent de l'indemnité compensatrice.

Cependant, la même chambre de la Cour de cassation a récemment jugé :

« Attendu que pour rejeter la demande d'indemnité de cessation de contrat de la société Sofradif, l'arrêt retient que celle-ci, qui a refusé de conclure le nouveau contrat proposé par la société Elsevier, ayant été à l'origine de la rupture de leurs relations, ne peut prétendre à cette indemnité ;

Qu'en statuant ainsi, alors que l'agent commercial qui refuse de conclure un nouveau contrat à l'expiration du précédent n'a pas l'initiative
de la cessation du contrat au sens du second texte susvisé, de sorte qu'il n'est pas privé du droit à indemnité prévu par le premier, la cour d'appel a violé lesdits textes ».

(Cass. Com. 21 juin 2017, pourvoi n° 15-29127)

(Lien ici)

Il apparaît donc que la Cour de cassation a opéré un revirement de jurisprudence, étant observé que l'arrêt de 2010 n'a pas été publié au Bulletin, contrairement à celui de juin 2017.
Il faudrait cependant se garder de considérer le revirement apparent comme étant général.

Une lecture conjointe des deux arrêts est en effet possible, pour peu que l'on s'intéresse aux circonstances propres à chacune des décisions.

Dans l'arrêt de 2010, l'agent commercial avait refusé un renouvellement du contrat à durée déterminée avant l’acquisition du terme, et il se déduit de l'arrêt que les conditions du premier contrat devaient être largement reconduites.

Dans l'arrêt de 2017, les circonstances sont quasiment identiques mais il apparaît que le mandant avait, préalablement aux termes des contrats d'agence et aux négociations en vue de conclure de nouveaux contrats, notifié à l'agent le non-renouvellement des contrats à durée déterminée.

Il semble donc qu'il faille rechercher qui est effectivement à l'origine de la rupture de la relation contractuelle pour déterminer si l'indemnité de l'article L 134-12 est due à l'agent ou pas.